21/05/2010

Le Royaume-Uni Europhile ?

Malgré l'opinion généralement admise, le Royaume-Uni n'est peut-être pas aussi eurosceptique que le laissent penser les journaux français.


Le Royaume-Uni est-il euro-sceptique ?

Le pays a refusé la liberté de circulation totale des personnes sans contrôle, prévue par le traité de Schengen.
Le pays a également refusé l'Euro
Le pays, encore, a obtenu une réduction de sa contribution financière à l'Union européenne.

Pour autant, c'est peut-être une vision simpliste des choses de considérer que le Royaume-Uni est un pays eurosceptique ou opposé à la construction européenne. Peut-être même le Royaume-Uni peut-il être considéré comme fédéraliste !

Qu'est-ce que l'Union européenne ? Il s'agit de la réunion de plusieurs pays, souverains, qui décident de mettre en commun des parties de leur souveraineté parce qu'ils pensent qu'ensemble, ils atteindront un résultat qui sera meilleur pour eux.

Chacun des 27 pays membres de l'Union européenne ont fait ce choix et l'a renouvelé à chaque fois qu'ils ont modifié ensemble le traité de Rome de 1957. Bien sur, cela ne veut pas dire qu'ils étaient pleinement enthousiastes avec chacune des dispositions des traités. Un traité est un texte de compromis qui doit être accepté par les 27 Etats, et qui comporte dont des avantages et des inconvénients pour chacun. Le but, finalement, est qu'aucun défaut du texte ne soit trop important pour un pays, et que le texte soit globalement bénéfique pour tous. C'était tout l'enjeu du traité de Lisbonne, qui était trop libéral pour certains pays (la France notamment lors du rejet par référendum du traité constitutionnel en 2005) et trop social pour d'autres (La République Tchèque ou le Royaume-Uni notamment).

Le fait que le Royaume-Uni s'oppose à un nouveau traité parce qu'il lui impose une liberté de circulation des personnes, difficilement compatible avec son attitude vis à vis du Commonwealth, en fait-il un pays Eurosceptique ? Probablement pas, chaque pays devant rester libre de choisir d'abandonner ou non sa souveraineté.
Le fait que le Royaume-Uni demande une diminution de sa contribution à l'Union européenne parce qu'il reçoit beaucoup moins que les pays, notamment agricoles, de l'Union, en fait-il un pays Eurosceptique ? La solidarité doit exister en Europe, mais ici encore, il ne faut pas qu'un pays subisse trop fortement sa participation à l'Union.

Le fait que le Royaume-Uni milite pour une Europe plutôt libérale que sociale fait-il de la patrie de Shakespeare un pays Eurosceptique ? Ici encore, malgré les déclaration qu'on entend trop souvent en France notamment, c'est loin d'être certain. Comme l'a déclaré David Cameron, nouveau premier ministre britannique, le 20 mai 2010 (Nord Eclair 21 mai 2010), "Sur l'Europe, le gouvernement promet de jouer un rôle de premier plan, mais souligne qu'aucun nouveau pouvoir ne pourra être dévolu à Bruxelles sans un référendum préalable".

Le Royaume-Uni n'est pas Eurosceptique. C'est un pays qui a une vision plus libérale que les autre pays de l'Union européenne, qui eux ont une vision plutôt sociale. En aucun cas cela ne signifie que le Royaume-Uni est opposé à l'Europe, mais il s'oppose à un approfondissement social de l'Europe.

Le Royaume-Uni a dès lors intérêt à militer pour une approche politique de l'Europe, avec des vrais partis au sein du Parlement européen, une vraie politisation des débats. Car aujourd'hui, les personnes opposées à l'Europe et militants d'un repli nationaliste sont minoritaires. Une immense majorité des citoyens européens sont pour l'Europe, mais ne sont pas d'accord sur les missions de l'Europe, entre l'Europe marché et l'Europe sociale. Une immense majorité des citoyens sont favorables à la "fédération d'Etats Nations" défendue par Jacques Delors, certains militant pour une affirmation des nations et d'autres pour un renforcement de la dimension fédérale au sein de cette organisation.

Oublier la dimension politique de l'Europe, c'est faire le jeu du nationalisme qui, dans les opinions publiques, présente un pays qui milite pour une Europe libérale ou un pays qui milite pour une Europe trop sociale comme eurosceptique et opposé à la construction européenne. C'est tout le contraire. Les opposants au traité constitutionnel tels que Laurent Fabius ou Olivier Besancenot appelaient à voter contre le traité constitutionnel, non pas parce qu'ils étaient opposés à l'Europe, mais parce qu'ils souhaitaient négocier un autre traité qui comportait encore plus de pouvoirs dévolus à l'Europe, dans le domaine social. De même que l'Irlande, la Pologne, le Royaume-Uni ou la République Tchèque étaient réticents à ratifier car ils souhaitaient obtenir un traité plus libéral. Mais tous étaient partisans d'une Europe forte !

Olivier BEDDELEEM, beddeleemo@gmail.com
Enseignant-chercheur à l'ISEG, http://legalstrategy.canalblog.com
Fondateur des Jeunes de l'Eurométropole, http://eurometropole.nordblogs.com
Vice-Président des Jeunes européens-Lille, http://jelille.canalblog.com

09:51 Publié dans Europe | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : europhilie, cameron, lib-dems

Commentaires

Waw, j'apprécie votre article, je vous remercie pour ces astuces et notez dans un premier temps que je suis complètement d'accord avec vous ! Euh tout est dit, oui votre blog est sincèrement excellent, je pensais à tout ça en y'a pas longtemps. NB : Je vais avoir besoin d'un peu de temps pour cogiter là-dessus.

Écrit par : smiley faces gnarls barkley listen ... | 16/06/2010

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